Et si le prochain Maire de Paris était le dernier ?
- Sylvain Bogeat

- il y a 12 minutes
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L’année 2026 verra l’ouverture d’une nouvelle ligne du Grand Paris Express. Cette avancée n’est pas seulement un chantier d’infrastructures : elle complète une métropole qui vit déjà, qui respire déjà, mais qui n’a toujours pas trouvé son incarnation politique. À l’approche des municipales, une question s’impose : à quelle échelle voulons-nous gouverner ?
Un Grand Paris déjà vivant, malgré les frontières administratives
Le Grand Paris n’est plus un horizon lointain : c’est notre quotidien. Chaque jour, 800 000 habitants de la petite couronne convergent vers Paris pour travailler, pendant que 300 000 Parisiens filent en périphérie. Les 7 millions d’habitants de la métropole respirent le même air, subissent les mêmes embouteillages, partagent les mêmes difficultés pour se loger ou se déplacer. Les bassins d’emploi, les parcours scolaires, les activités culturelles et sportives tissent depuis longtemps un solide maillage territorial.
Avec la finalisation de quatre nouvelles lignes de métro d’ici 2031, les frontières invisibles qui segmentent notre région capitale achèveront de se dissoudre. Saint-Denis, Montreuil, Noisy-le-Grand, Orsay deviennent des centralités à part entière. Le Grand Paris Express n’est pas seulement un moyen de transport : c’est la manifestation physique d’une métropole qui existe avant même d’être gouvernée.
Un mille-feuille administratif devenu indéfendable
Notre organisation institutionnelle est pourtant kafkaïenne. La Métropole du Grand Paris (MGP) souffre d’un déficit de légitimité démocratique, d’une mécanique interne poussive, et ne fait qu’ajouter une couche de plus à un mille-feuille déjà indigeste. Communes, intercommunalités, établissements publics territoriaux, départements, MGP, Région… Les responsabilités se chevauchent, les budgets se dispersent, les décisions se contredisent. Les habitants votent dans les limites étroites d’un découpage hérité d’un autre siècle et … ne sont même pas consultés pour l’élection des hiérarques de la Métropole du Grand Paris.
Il faut clarifier. Il faut simplifier. C’est à ces conditions que nous pourrons poursuivre un aménagement territorial ambitieux et efficace.
Municipales 2026 : l’occasion d’une prise de conscience
?
Deux périmètres géographiques se présentent pour faire évoluer la métropole. Celle-ci pourrait fusionner avec la Région Île-de-France ou avec la petite couronne. Cette deuxième solution, le “petit Grand Paris”, est probablement la plus logique. Elle correspond à un bassin de vie cohérent, évitant de se diluer avec des territoires plus disparates comme les franges de la Seine-et-Marne ou des Yvelines.
Dans ce cadre, la Métropole du Grand Paris pourrait progressivement récupérer des compétences aujourd’hui éclatées. L’urbanisme, le logement et l’aménagement, pour enfin mener une politique de construction à l’échelle pertinente. Les mobilités locales, articulées avec Île-de-France Mobilités. Les solidarités et la cohésion territoriale pour éviter les doublons bureaucratiques. Le développement économique, pour mettre fin à la concurrence stérile entre Paris, les départements et la Région.
Eric Woerth appelait il y a deux ans à des structures plus simples, plus cohérentes, moins coûteuses. Combien de rapports faudra-t-il pour avancer?
Aura-t-on un Maire du Grand Paris?
Je suis convaincu que le prochain grand chantier du Grand Paris ne sera pas technique, mais démocratique. Et le prochain Maire de Paris devra s’emparer de ce sujet et en être le chef de file, en l’absence du gouvernement qui semble avoir déserté cette bataille.
Pour incarner cette nouvelle échelle, l’élection directe d’un exécutif métropolitain s’imposerait naturellement. Sans incarnation, pas de vision, pas de destin collectif.
Fusionner certaines communes, redessiner les périmètres, redistribuer les compétences : ce n’est pas un fantasme technocratique. C’est la seule manière de reconnecter l’action publique avec la réalité vécue par des millions de franciliens.
Le prochain Maire de Paris doit avoir l’ambition et le courage de devenir être le premier Maire du Grand Paris. Non pas en annexant son voisinage, mais en assumant enfin la construction politique d’une métropole qui existe déjà dans les faits.
Il faudra un élu prêt à regarder la vérité en face : Paris seule n’est plus la bonne échelle pour décider.
Sylvain BOGEAT
Président du Think Tank Métropoles 50
Associé fondateur Vestack



